Le Lézard

Médecine: des jeux vidéo pour soigner les handicapés


Les jeux vidéo sont-ils en train de devenir une nouvelle forme de thérapie médicale ? Nous vous parlions tout récemment de « Brain Age », le nouveau succès de Nintendo, qui cible le public des personnes âgées et leur permet de maintenir une activité intellectuelle. Il semble bien que cette tendance à voir dans les jeux vidéos un outil médical fasse son chemin. Un système de neuro-rétroaction pour aider les enfants victimes de troubles nerveux, par exemple est en train de faire ses preuves.



À Los Angeles, Ethan Myers, un petit garçon de neuf ans est victime en 2002 d’un grave accident de la route. Après un coma de presque un mois, quand il se réveille, les médecins déclarent après diagnostic qu’il ne pourra plus jamais manger, parler et marcher sans assistance. Pourtant, en 2006, Ethan Myers va à l’école comme tous les enfants de son âge, et arrive même malgré les traces de l'accident à lire à haute voix en classe. « Je fais exactement les mêmes choses qu’eux » raconte Ethan Myers à propos de ses camarades de classe. « Je ne pouvais pas me rappeler des endroits où je mettais mes affaires et maintenant j’y arrive. Je me souviens des trucs de l’école et des noms des gens ». La raison de ce miracle ? Une thérapie par les jeux vidéo, affirment ses parents et certains spécialistes. Ethan Myers a débuté cette thérapie en 2004, après avoir réappris à marcher.

Neuro-rétroaction ou neuro-feedback
Cette thérapie porte un nom spécifique. Il s’agit d’un entraînement à la neuro-rétroaction (neuro-feedback), par l’intermédiaire d’un système appelé CyberLearning Technology LLC. C’est la compagnie Smart Brain Games qui propose ce système. Et cela semble fonctionner au point que Howard Myers, le père de l’enfant, affirme que désormais, Ethan est revenu à un état semblable à celui qui était le sien avant l’accident. Steven Stockdale, le psychologue qui travaille avec Ethan Myers confirme les changements survenus chez ce dernier depuis qu’il a commencé sa thérapie par les jeux vidéo. « Les enfants peuvent devenir moins agités, plus calmes, moins en colère », bref apprendre à nouveau à se maîtriser en dépit des traumatismes passés.

Interaction joueur-système
Mais comment fonctionne-t-il exactement ? La neuro-rétroaction est une forme de conditionnement qui récompense les joueurs en fonction des ondes mentales qu’ils produisent. Ces ondes mentales, que nous produisons tous, donnent des indications sur notre état nerveux. Dans le cas d’Ethan Myers, il semble que ce système lui ait permis de progresser et de résorber ses différents troubles nerveux. Pratiquement, le patient joue à un jeu vidéo classique, et est relié par un casque équipé de capteurs au système de neuro-rétroaction. Le système note quand la personne a une activité cérébrale intense, voire de stress, ou quand elle est en état de relaxation. Une interaction a lieu alors entre le système et la console de jeux ou l’ordinateur afin de gérer la douleur et l’anxiété du joueur.

Courses de voitures
Les données échangées entre le système et le joueur circulent par un système de neuro-rétroaction qui permet de contrôler les commandes du jeu. Le type de jeu qui fonctionne le mieux est le jeu de course de voiture (Burnout, Collin McRae Rally 3, Gran Turismo, Crash Bandicoot, Midtown Madness 3, autant de jeux adaptables avec le système). En effet, ce type de jeu de course de voiture permet tout particulièrement de faire progresser l’enfant grâce aux contrôles de la voiture. Le jeu est paramétré de manière à ce que la vitesse et la direction de la voiture puissent être contrôlées plus facilement par le joueur si son état cérébral correspond à ce qui est demandé par le système de rétroaction. Par exemple, si le joueur n’est pas en état cérébral de relaxation, les commandes de la voiture sont plus difficiles à diriger. Et il faut que le joueur puise en lui-même les ressources afin de se calmer pour pouvoir diriger sa voiture avec plus de facilité. Par ce processus, à force d'entraînement, le patient peu à peu apprend à se maîtriser et recouvre ses capacités.

Inspiré des outils de la NASA
Bien que des traitements existent depuis des années pour aider les patients à surmonter ce type de troubles, le fait d’y incorporer des jeux vidéo permet de soigner des patients particulièrement sensibles à ce type de support, les enfants surtout, plutôt que de proposer des traitements médicaux lourds. Le système est basé sur un logiciel développé par la NASA (National Aeronotics and Space Administration). À l’origine, cet appareil servait à l’entraînement des pilotes de chasse qui devaient rester en alerte pendant de longues amplitudes horaires tout en se comportant avec calme et sang froid pendant les moments de pression intense. Le CyberLearning Technology LLC est compatible avec les consoles de jeu PlayStation 1 et 2 de Sony, mais aussi avec la Xbox de Microsoft. Ceci permet de proposer le produit sur des supports et des jeux déjà bien connus des enfants et des familles.

Précautions d'utilisation
Cependant, les adeptes du système préviennent de la complexité d'utilisation de l'appareil et la part de risque qu'il faut prendre en considération. Margaret MacDonald, un médecin californien dont le fils souffre de déficit d’attention a commencé l’an passé à utiliser ce système pour son enfant. La thérapie a duré trois mois. Les séances étaient de 20 à 25 minutes, et ce, deux fois par semaine. Le résultat fut très positif, mais son jugement sur la méthode est contrasté: « Ce n’est pas quelque chose avec lequel vous pouvez jouer. Vous pourriez mal faire et provoquer chez le patient plus d’anxiété et d’irritabilité ».

Inquiétudes du corps médical
Par ailleurs, dans la communauté médicale, des voix s’élèvent pour critiquer ce programme. Pour le docteur Andrew Adesman, chef du département pédiatrique de l’hôpital pour enfant Schneider de New York, il faut relativiser l’efficacité de ce type de programme sur les enfants. « Nous avons des traitements très efficaces pour les enfants. Je suis assez inquiet pour ces parents qui choisissent des thérapies coûteuses et pas vraiment reconnues au lieu de thérapies qui ont fait leurs preuves ». De plus, les traitements classiques sont généralement pris en charge par les assurances médicales, alors que la neuro-rétroaction ne l’est pas. De fait, le CyberLearning Technology LLC est relativement onéreux. Car en plus de l’achat du matériel (584 dollars) un professionnel de santé est présent à chaque séance avec l’enfant, et ce, pendant toute la durée du programme, qui dure généralement six mois. Le coût de ces interventions peut monter à 2500 dollars. Souhaitons que si de tel systèmes se démocratisent, ils puissent être un jour accessibles au plus grand nombre.

Publié le 01/04/2006 à 20h00 par Guillaume Serries


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