Le Lézard
Sujets : Enfance, Politique intérieure, Plaidoyer (politique), CPG, DEI

Réaction de la FFARIQ - Lettre au ministre Lionel Carmant


QUÉBEC, le 24 févr. 2022 /CNW Telbec/ - Le texte qui suit est une lettre ouverte rédigée par des personnes accueillant des enfants de la protection de la jeunesse, et appuyée par Geneviève Rioux, présidente de la Fédération des familles d'accueil et ressources intermédiaires du Québec (FFARIQ) au lendemain de la parution dans La Presse de la chronique de Patrick Lagacé

À la suite de la chronique de Patrick Lagacé sur les PFAP (postulants à titre de famille d'accueil de proximité), nous nous adressons à vous. Ces personnes aimantes qui accueillent des enfants confiés par la DPJ et/ou les tribunaux attendent des mois voire des années pour être accréditées. Comme l'a écrit M. Lagacé, « l'État les traite comme du cheap labor ».

Nous prenons notre courage pour nous réunir et dénoncer une situation inacceptable vécue par des enfants de la protection de la jeunesse, des « enfants de l'État ». Nos histoires, celles de nos enfants d'accueil, sont similaires, voire systémiques.

Elles débutent alors que le tribunal de la Cour du Québec, Chambre de la Jeunesse nous confie un ou des enfants. C'est la magistrature qui nous sélectionne, dans LE meilleur intérêt de l'enfant. Spécifiquement nous, parents, après une étude détaillée de la preuve présentée à nos frais. Ensuite, jour après jour, nous prenons soin de ces enfants.

Mais là où le bât blesse, et c'est ce que nous dénonçons, c'est que les enfants qui nous sont confiés par des juges spécialisés le sont parfois sans l'accord, « la bénédiction », de la DPJ et de l'établissement. Sans cet accord, les PFAP ne peuvent être accrédités comme famille d'accueil, ce qui fait en sorte que les enfants que nous accueillons n'ont pas accès aux mêmes ressources que les enfants confiés à des personnes accréditées par la DPJ et l'établissement. Il s'agit d'une injustice pour nos enfants.

Le résultat de la décision de la magistrature, qui se tient droit debout aux côtés des enfants contre l'avis du DPJ, contre sa volonté, est le refus de l'établissement de nous accorder le statut de famille d'accueil.

Dans notre vision et celle des tribunaux, nous sommes des personnes bienveillantes qui ont un lien, parfois significatif, parfois simple, avec ces enfants. Des parents d'accueil ont été sélectionnés pour prendre soin d'un enfant. Nous sommes pris dans un engrenage entre le coeur, la raison et les moyens.

Nous sommes les élus sélectionnés par des juges hautement spécialisés, mais pas nécessairement les élus « accrédités » par l'administration publique. 

Expliquez-nous Monsieur le Ministre pourquoi vous permettez que le DPJ puisse refuser de prendre soin de nos enfants sous principe que ce n'est pas lui qui a choisi mais un tribunal?  Nous sommes les meilleurs dans l'intérêt de l'enfant mais pas assez bon pour être reconnus famille d'accueil...

Nous nous retrouvons dans une situation particulièrement précaire. Nous sommes en lice pour une accréditation qui tarde à venir. On nous a « classé » postulant dans le « parc de ressources » de l'établissement.

Ce fameux statut de famille d'accueil qui n'arrive pas, ou qui arrive tardivement. Ce statut qui, bien au-delà d'une rétribution pour la personne qui accueille l'enfant, permet à « l'enfant de l'État » de bénéficier des allocations vêtements, soins de santé, services et effets scolaires, activités parascolaires, transport, jouets, frais de service de garde, garderie, besoins particuliers, etc. Ce fameux statut qui permet à l'enfant de recevoir ce dont il a besoin, de ne pas revivre ce pourquoi il est parfois déplacé de son milieu familial.

Accueillir un enfant nécessite plus que de l'amour et du don de soi!

S'il faut, comme certains d'entre nous le font, vendre notre maison, trouver, un deuxième emploi, accepter humblement les dons des organismes communautaires pour continuer à accueillir nos enfants d'accueil, nous continuerons.

En nous adressant à vous Monsieur le Ministre, nous remettons notre confiance entre vos mains et l'intérêt de nos enfants d'accueil, puisqu'il y aura un contrecoup à cette lettre. Il y a toujours un contrecoup.  Contester un DPJ et un établissement, peut mettre à risque nos enfants d'accueil. Nous ne voulons aucunement les compromettre car ils ont déjà été assez abîmés, déplacés, bafoués et brimés.

Monsieur le Ministre, vous devez savoir que les établissements bafouent le droit des enfants de la DPJ et nous vous implorons de bonifier le projet de loi 15 mais aussi d'intervenir directement auprès des établissements afin que chaque personne à qui un enfant est confié par un juge de la Cour du Québec, Chambre de la Jeunesse, accède au statut de famille d'accueil, et ce, dans l'intérêt supérieur de ces enfants.

Quoi dire de plus pour démontrer que seuls le coeur, l'accueil, l'amour et la bonne volonté ne suffiront pas pour répondre aux besoins particuliers de ces enfants que nous aimons profondément?

Nous vous proposons aujourd'hui d'inclure dans le projet de loi 15 cette prérogative afin que les établissements ne mettent plus les enfants, nos enfants d'accueil, en péril et que les "enfants de l'État" qui nous sont confiés ne subissent plus de discrimination.

Nos enfants d'accueil méritent mieux que du cheap labor dans leur vie.

SOURCE Fédération des familles d'accueil et ressources intermédiaires du Québec (FFARIQ)



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