Le Lézard
Sujets : Enfance, Femme, MAT, DEI

La violence conjugale doit être reconnue comme un motif de compromission du bien-être de l'enfant


MONTRÉAL, le 10 févr. 2022 /CNW Telbec/ - En cette 3e journée de consultations en commissions parlementaire sur le Projet de loi 15 visant à modifier la Loi sur la protection de la jeunesse (PL-15), l'Alliance des maisons d'hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (Alliance MH2), seul regroupement de maisons d'hébergement à être entendu, souhaite adresser la question de la violence conjugale qui, de façon incompréhensible, ne figure pas au PL15 actuellement. Une situation consternante et à contre-courant des besoins et des attentes après 17 féminicides, 2 infanticides et 40 orphelins des suites de la violence conjugale en 2021.

La violence conjugale, un motif de compromission à part entière du bien-être de l'enfant
Dans une dynamique de violence conjugale, un conjoint (en grande majorité le père) exerce un contrôle coercitif sur l'autre (la mère) et, par le fait même, sur ses enfants. Le contrôle coercitif correspond à une dynamique de contrôle et de domination à l'intérieur d'une relation entre partenaires intimes, où l'agresseur va multiplier les agressions pour asseoir une emprise totale sur sa victime, annihilant complètement sa liberté d'être et d'agir. Les enfants représentant plus de la moitié des personnes hébergées en maison d'hébergement de 2e étape (MH2), les intervenantes qui y travaillent sont hautement en mesure de constater les effets dévastateurs de la violence conjugale postséparation sur les enfants (stress post-traumatique, troubles d'attachement, troubles d'anxiété, problèmes d'apprentissages, retards académiques, etc.).

« Il est primordial que la lunette analytique au sein des instances de la protection de la jeunesse évolue afin de ne plus considérer les enfants comme uniquement exposés à la violence conjugale, mais véritablement comme des co-victimes de cette violence. La violence conjugale doit devenir une catégorie distincte de mauvais traitements et être intégrée comme un motif de compromission à part entière du bien-être de l'enfant. »

Sabrina Lemeltier, présidente de l'Alliance MH2 et membre du
Comité d'experts Rebâtir la confiance

La DPJ fait elle aussi partie du continuum de services en violence conjugale
Nous constatons que les craintes verbalisées par les enfants et les mères à l'endroit des comportements violents du père sont non seulement souvent ignorées par la DPJ, mais discréditées au point d'être perçues comme un indicateur de comportements aliénants de la mère (c'est le cas pour 7% des femmes hébergées en MH2). Une situation hautement problématique lorsqu'on sait que la séparation est un moment où la femme et les enfants font face à une dangerosité accrue alors que les stratégies de domination et de contrôle de l'ex-partenaire violent se transforment, se multiplient et perdurent. Il est primordial qu'un changement de pratiques s'amorce au sein de la DPJ de concert avec les maisons d'hébergement et d'autres ressources communautaires d'aide aux victimes.

« Afin de préserver des vies, l'Alliance MH2 en appelle non seulement à une solide formation en continu des intervenant.e.s de la DPJ en matière de violence conjugale, mais aussi à l'adoption d'une approche intersectorielle avec les maisons d'hébergement dans la mise en place de plans d'interventions. Les services de la DPJ devraient siéger d'office aux cellules de crise en déploiement, ainsi qu'aux tables de concertation en violence conjugale, et avoir les moyens de le faire efficacement. »

Maud Pontel, coordonnatrice de l'Alliance MH2 et membre du
Comité d'examen des décès liés à la violence conjugale

Un besoin de cohérence gouvernementale
L'année 2021 a non seulement été marquée par une hausse fulgurante de féminicides et d'infanticides en contexte de violence conjugale, mais aussi de mises en place de changements structurels profonds longuement attendus afin de garder les victimes comme point focal des interventions de l'ensemble des acteurs socio-judiciaires. Du plan d'action quinquennale en violence conjugale 2018-2023, en passant par le rapport Rebâtir la confiance (2020) au rapport du Bureau du coroner Agir ensemble pour sauver des vies (2020), tous font des recommandations appelant à des changements structurels et systémiques dans les pratiques d'intervention en matière de protection de la jeunesse dans les dossiers présentant des situations de violence conjugale. Il est donc important que la modification à la Loi sur la protection de la jeunesse emboîte le pas et entame un travail dans la même direction.

« Nous ne pouvons cacher notre stupéfaction face à ce projet de loi qui ne mentionne aucunement la problématique de la violence conjugale et de la violence conjugale postséparation alors que, dans la dernière année, nous avons assisté à des efforts gouvernementaux colossaux et historiques afin de resserrer le filet de protection autour des victimes. Le travail vers une meilleure cohérence judiciaire pour les victimes doit ultimement résonner de manière transversale dans la modification de la loi sur la Protection de la jeunesse. »

Gaelle Fedida, coordonnatrice aux dossiers politiques de l'Alliance MH2

Comme elle le fait avec l'ensemble des instances gouvernementales concernées par les enjeux de violence conjugale, l'Alliance MH2 se tient prête à collaborer en profondeur avec tous les responsables concernés à la protection de la jeunesse afin de générer des changements cohérents et durables.

Consultez le mémoire de l'Alliance MH2 

L'Alliance des maisons d'hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (Alliance MH2) compte 34 maisons membres dans 14 régions du Québec dont l'objectif principal est la prévention de l'homicide conjugal. Les MH2 hébergent annuellement plus de 500 femmes et enfants par année dans 145 appartements sécurisés. Elles offrent des services spécialisés en violence conjugale postséparation, au regard de la dévictimisation, de l'analyse de la dangerosité du conjoint, des impacts sur les enfants exposés à la violence conjugale, de la réinsertion sociale des victimes et de l'autonomisation des femmes hébergées. Le premier critère d'admission est la dangerosité de l'ex-conjoint; 8% des femmes au départ d'un refuge d'urgence, vivent des enjeux de sécurité majeurs et auront besoin d'un hébergement de 2e étape.

SOURCE Alliance des maisons d'hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale



Communiqué envoyé le et diffusé par :