Dans la bataille commerciale qui oppose désormais les acteurs du Blu-Ray et du HD-DVD, un arbitre pourrait faire son jeu. L’industrie de la pornographie, énorme pourvoyeur de vente de DVD, pourrait en effet faire pencher la balance en faveur d’un des deux formats. Les fesses vont-elles décider de l’avenir du disque?
Déjà dans les années 80, deux formats de cassette vidéo s’étaient disputé le marché très prisé et alors naissant de la vidéo à domicile. Les plus anciens se souviennent peut-être que des formats VHS et Betamax, c’est le premier qui l’avait finalement emporté, et ce, grâce à l’appui de l’industrie de la pornographie. Paradoxe artistique, le format Beta était pourtant de qualité bien supérieure à son concurrent. L’histoire pourrait se répéter très prochainement avec les DVD haute définition (HD-DVD). Aujourd’hui, l’industrie de la pornographie dans le monde génère un revenu annuel mondial de 57 milliards de dollars. Ce poids commercial, mis au service d’un des deux formats, pourrait être décisif.
Effet de levier
L'influence de cette industrie pourrait par effet de levier entraîner d’autres acteurs du monde des médias dans le sillage d’un des deux formats. Ron Wagner, le directeur informatique de E! Entertainment Television (une chaîne de télévision par câble et par satellite américaine et internationale clamant en 2005 toucher 80 millions de foyers aux États-Unis et 400 millions de foyers à l'étranger) explique que sa société devrait se calquer sur les décisions des bonzes de l’industrie du porno dans les prochains mois. Et, pour lui, le porno a d'ores et déjà choisi le format Blu-Ray au détriment du HD-DVD.
Le poids du porno
À la dernière conférence annuelle de l’Association nationale des diffuseurs américains qui avait lieu à Las Vegas le mois dernier, ce sujet a été abordé; il semble que les poids lourds du porno américain aient choisi leur camp. «
Quand vous regardez les standard VHS et Beta, vous voyez que le standard avec la meilleure qualité est mort à cause du soutien de l’industrie de la pornographie au format VHS. Le volume massif de cassettes du marché porno est sorti à cette époque en format VHS » explique Wagner.
Nuances
Mais cet avis est loin d’être partagé par tous les spécialistes de la question. Steve Duplessie, du cabinet Enterprise Strategy Group, explique qu’il ne faut pas coller le cas VHS à celui du Blu-Ray. Selon lui, ce n’est pas l’impact de l’industrie du porno dans les années 80 qui a fait chuter le format Betamax. Il s’agit plutôt du fait que ce dernier format était propriétaire (il appartient toujours à Sony) alors que les conditions d’utilisation du VHS étaient plus libres. Ceci en expliquerait le succès. «
J’aime le concept global de la pornographie simplement parce que le porno reste l’usage qui rapporte le plus d’argent sur Internet. Mais je ne crois pas que l’industrie du porno va diriger le choix du format. Comme dans d’autres industries, elle va fournir ce que veut le consommateur » explique-t-il.
Le poids des entreprises
Au-delà de l’impact du porno sur le sort des formats Blu-Ray et HD-DVD, on trouve aussi d’autres facteurs qui pourraient donner un avantage à un des deux concurrents. Le HD-DVD est soutenu par un consortium qui regroupe des marques telles que Toshiba, NEC et Warner Home Video. Le Blu-Ray, quant à lui, est issu de la collaboration de Panasonic, LG Electronics, Philips Electronics, Disney et Fox. Les performances de chacune des entreprises citées ici joueront sans nul doute sur l’avenir des formats qu’elles défendent.
Différences techniques
De plus, d’un simple point de vue technique, le Blu-Ray présente une capacité de stockage de 20 Go supérieur au HD-DVD (50 Go pour 20 Go). Toutefois, la qualité intrinsèque du produit pourrait peu jouer dans la décision finale comme ça a été le cas entre les formats Beta et VHS.
Les mois prochains devraient permettre de se faire un avis sur la question : qui de l’argent, du sexe ou du consommateur définira les supports de l’information numérique?