Le Lézard

La science et les jeux de rôles en ligne


Le phénomène des jeux de rôle en ligne (mmorpg pour les intimes) est tel qu’il commence à être étudié à l'université. À dire vrai, c’est surtout depuis le lancement de World of Warcraft, qui réunit plus de quatre millions de joueurs de par le monde (un million aux États-Unis), que les études fleurissent, et une grande part de ces travaux concerne le phénomène de dépendance que pourrait générer ce type de jeux.



Sur ce point, les experts sont divisés sur le terme de dépendance, puisque ''l’opium électronique'' n’engendre pas de dépendance physique. La dépendance psychologique semble, quant à elle, réelle et bien marquée en fonction des individus. ''Ils ont (les joueurs) des symptômes d’accoutumance. Ils ne peuvent pas supporter d’attendre pour retourner sur le jeu de nouveau. Les jeux sont faits pour être addictifs'' remarque Maressa Orzack, responsable du centre d’étude sur la dépendance aux ordinateurs, de l’hôpital psychiatrique McLean, à Belmont au Massachusetts. Elle travaille quotidiennement avec des personnes qui ont quitté leur travail ou leurs études, voire leur famille, à cause de la dépendance aux jeux de rôle en ligne. Bien sûr, nul n’ignore plus maintenant les excès, relatés dans la presse, de quelques joueurs frénétiques qui ne sont pas sortis indemnes des longues heures de quêtes. En août dernier, on apprenait le décès d’un Coréen de 20 ans qui avait succombé d’inanition après une séance de 50 heures consécutives sur "World of Warcraft" dans un cybercafé. En Chine, cette fois-ci, une clinique spécialisée s’est ouverte pour faire face à ce type de comportement déviant. Par ailleurs, le gouvernement chinois limite le temps de jeu des utilisateurs, mais au vu du nombre impressionnant de joueurs, il serait bien maladroit de parler de phénomène global de dépendance.

Faire du commerce


Par delà ces déviances, les chercheurs s’intéressent également aux interactions sociales qui découlent de l’utilisation de ces jeux vidéo, interactions qui se propulsent dans la vie réelle. Ainsi, on a découvert qu’en Chine des joueurs développent un système commercial sur la base des jeux de rôle en ligne. Ils accumulent des richesses virtuelles (pouvoirs, argent virtuel) lors de leurs parties et les revendent au plus offrant en espèces sonnantes et trébuchantes dans la vie réelle. C’est une des premières fois que l’on peut noter la force économique de la construction virtuelle sur un champ aussi vaste.

Vente sur eBay


Aaron Delwiche, professeur assistant en communication à la Trinity University de San Antonio au Texas, donne des cours sur les nouvelles cultures issues des jeux de rôle en ligne. Une de ses étudiantes a revendu son personnage sur le site de vente aux enchères en ligne eBay au prix fort, c'est-à-dire celui d’un voyage en Europe. En un sens, chacun peut construire et monnayer son "travail" virtuel, tout comme le ferait une industrie des loisirs, telle une maison de production cinématographique. La comparaison peut paraître douteuse, mais après tout, serait-ce si différent si cela était légal? Car tout le problème vient de là : l’illégalité des transactions de ce type, argent virtuel contre argent réel, pose des problèmes de plus en plus importants aux autorités responsables de réguler le système et les maisons d’édition de ces jeux font souvent la sourde oreille sur ce point.

15 % de femmes

Les études portent également sur le type de population sensible aux jeux de rôle en ligne. Il semble que ces jeux vidéo soient prisés par un public plus adulte que le public des jeux vidéo classiques. Preuve de cette évolution, l’étude de Nick Yee, étudiant à l'Université de Standford, qui s’attache à la psychologie des jeux de rôle en ligne, met à l'avant le vieillissement de la population des joueurs. Cet étudiant travaille sur les jeux de rôle depuis 1999. ''La masse des joueurs est plus vieille que ce que pensent les gens'' évoque Yee. L’âge moyen se situe entre 26 et 27 ans. Plus surprenant encore, 15 % des joueurs sont des femmes. Alors que la plupart des jeux vidéo ont un public exclusivement masculin, les jeux de rôle en ligne attirent des filles. Pour Yee, c’est parce que ces jeux contiennent un espace de convivialité identique aux salons de discussions et autres forums de l’Internet, fonctionnalités qui intéressent fortement le public féminin. ''C’est un espace très social où l’on peut discuter et se faire des amis pour de bon'' dit Yee. Mais ces amitiés entrent parfois en conflit avec la vie réelle des joueurs. Maressa Orzack évoque le cas d’un mariage virtuel entre deux joueurs, mariage qui a provoqué chez les conjoints des joueurs des réactions vives et légitimes.

Devenir un chef

Par ailleurs, en plus de l’aspect social des jeux de rôle en ligne, les chercheurs soulignent un des moteurs de ce type de jeu : la possibilité de progresser dans le rôle de son personnage. Contrairement aux aléas de la vie réelle, ces jeux offrent en effet des progressions impressionnantes aux joueurs. ''Beaucoup de personnes, dans la vie réelle, ne sont pas des héros'' commente Yee. Soudain, dans le jeu, ils deviennent des personnages avec des pouvoirs impressionnants, qui sauvent et ressuscitent d’autres joueurs, ce qui est extrêmement gratifiant en soi. Autre exemple, un adolescent peut se retrouver de manière virtuelle à la tête d’une armée de 100 guerriers/joueurs, souvent plus âgés que lui dans la vie réelle. Qui refuserait de se laisser entraîner dans un monde où les responsabilités se renversent? Où le plus banal des êtres humains peut se révéler un leader virtuel?

Des craintes bien connues

Mais face à cette avalanche de nouveautés sociales qui déconcertent, voire agressent, la majorité des chercheurs rappellent que l’histoire des nouveaux médias a toujours été entachée d’interrogations sur leur bien fondé. ''Quand la télévision est apparue, il y a eu beaucoup d’inquiétudes sur la dépendance télévisuelle." rappelle Aaron Delwiche.

De quoi alimenter encore un peu plus la polémique.

Publié le 27/10/2005 à 08h00 par Guillaume Serries

Source:
presence-pc.com



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