Le Lézard
Sujets : Première Nation, Plaidoyer (politique), DEI

DÉRIVE AUTORITAIRE AU MINISTÈRE DE L'ENVIRONNEMENT - Le ministre Benoît Charrette veut bâillonner les Anishnabeg


Lettre des Anishnabeg au ministre Benoît Charrette

KITIGAN ZIBI, QC, le 19 janv. 2023 /CNW Telbec/ - Le ministre de l'Environnement, Benoît Charrette, a pris une dérive autoritaire laquelle va non seulement engendrer une confrontation avec trois Premières Nations Anishnabeg, mais qui pourrait également, de par sa propre incohérence, nuire à la réalisation du projet d'interconnexion Hertel -New York.

Le 31 décembre 2020, Benoît Charette utilisait son pouvoir discrétionnaire et introduisait en catimini une modification à la réglementation éliminant l'obligation qu'a le gouvernement du Québec de procéder à une évaluation environnementale dans les cas d'augmentation de puissance d'installations hydroélectriques. Cela signifie que l'on peut désormais augmenter le débit des turbines et accroître la productivité des équipements sans considérer l'impact de telles modifications sur les territoires traditionnels autochtones, ni consulter ces derniers.

Au diable les droits constitutionnels!

Ce geste de Benoît Charette constitue une entorse majeure aux droits constitutionnels des Premières Nations, mais cela ne semble pas préoccuper le Ministre outre mesure. Les préoccupations résident plutôt du côté des Anishnabeg de Kitigan Zibi, de Lac Simon et de Pikogan (Abitibiwini). N'ayant plus désormais droit de parole sur une question qui touche directement l'exploitation et la préservation de leur territoire ancestral (le Nitakinan), où - rappelons-le - est produit et transporté un pourcentage appréciable de l'électricité destinée aux États-Unis, les communautés concernées décident de se rabattre sur la raison d'être elle-même de ce projet. Dans un courriel envoyé au Ministre le 24 octobre 2022, elles demandent à être entendus dans le cadre d'une consultation sur le projet de ligne d'interconnexion, puisque l'électricité destinée à alimenter l'État et la ville de New York est produite en partie sur leur territoire.  

Un non-recevoir systémique

Dans une lettre qu'il leur a adressée le 15 novembre dernier, le ministre Charette refuse carrément de considérer cette demande. La jugeant « frivole » en vertu de l'article 31.3.5 de la Loi sur la qualité de l'environnement, il la rejette d'emblée alors qu'elle réfère explicitement aux droits constitutionnels de ces Premières Nations. Selon lui, puisque le tronçon québécois  de la ligne d'interconnexion Hertel-New York n'est pas situé sur les territoires revendiqués par les trois communautés autochtones, leur demande est irrecevable. Résultat : on ne peut ni être entendu dans le cadre de consultations portant sur l'impact des augmentations de puissance d'équipements sur nos territoires ancestraux, ni sur la question de la destination et de l'utilisation d'électricité produite et transportée sur notre propre Nitakinan. Les Américains appellent ça un « Catch 22 ». 

On exige des engagements

Mais justement, qu'en pensent les Américains? Dans leur réponse adressée aujourd'hui au ministre Charrette, les Chef(fes) des trois Premières Nations concernées lui rappellent que les autorités politiques de la ville de New York sont bien au fait de la réalité autochtone et s'en disent préoccupées. Ils font valoir que si le gouvernement du Québec juge irrecevable leur demande d'audiences publiques, la « Public Service Commission » de l'État de New York stipule pour sa part que des engagements précis concernant les Premières Nations au Québec devront être pris. Cette exigence de la Commission américaine fait suite à des audiences publiques au cours desquelles furent déposés les commentaires et mémoires de quelque 128 organisations et pas moins de 5 200 individus. La Commission précise que les impacts des projets d'Hydro-Québec sur les Premières Nations sont un sujet de préoccupation clé pour de nombreux participants aux audiences et que c'est particulièrement le cas pour la Ville de New York. Il faut croire qu'à New-York, on ne partage pas la vision dirigiste et réductrice du ministre Charette.

L'art de se tirer dans le pied

Les Chef(fes) Anishnabeg rappellent également à Benoît Charrette que l'entente avec la Ville de New York prévoit des dispositions permettant à cette dernière de se retirer du contrat si les droits des Premières Nations ne sont pas respectés. En d'autres mots, ils font remarquer qu'avec sa dérive autoritaire, le Ministre mettrait lui-même en péril le contrat d'Hydro-Québec avec les États-Unis. Pour citer l'ex-premier ministre du Québec, le défunt Jacques Parizeau, Benoît Charrette serait en train de « s'auto-pelure-de-bananiser »! 

SOURCE Coalition Anishnabeg ? Kidigan Zibi, Lac Simon, Abitibiwini



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